Ils ronflent…
mercredi 12 mars 2008Cette nuit-là je n’arrivais pas à m’endormir.
La pleine lune regardait par la fenêtre ouverte.
Des ombres déchirées sur le mur m’énervaient. C’est les branches du tulipier qui se balançaient au petit vent de la nuit qui n’apportait pas assez de fraicheur.
Le moindre bruit qui venait du jardin me faisait peur.
Je me retournais d’un côté sur l’autre en essayant de me concentrer sur des pensées agréables mais seulement des pensées sombres me poursuivaient.
Je me suis levée, ai traversé la chambre sur les pointes comme une danseuse de ballet pour ne pas faire de bruit et ai tiré les rideaux: plus de lune, plus d’ombres.
Après je me suis installée confortablement sous ma couette et ai fermé les yeux. J’ai décidé de composer un nouveau poème. C’est une astuce très efficace. Ainsi je m’endors tout de suite!
Mais le silence de mes recherches poétiques fut tout à coup perturbé par un terrible bruit: mon mari qui dormait tranquillement à mon côté a commencé à ronfler. Quelle horreur!
Il sifflait comme un oiseau: ii..ou…tii..u..fouui..ttu….
« Oui, c’est ça », je me suis dit. «Fini, mon sommeil! » et j’ai secoué mon mari par le bras. Il s’est calmé pour une minute et a recommencé encore plus fort: frrr…grrrr…frrr…grrr..
« Mon Dieu! Mais tu ronfles comme une bête! Va dormir au salon! C’est impossible ! »
Comme il n’a pas réagi je l’ai poussé très très fort et ai dit: « Tourne-toi vers l’autre côté au moins! »
Il a obéi dans son sommeil et s’est retourné. Le silence s’est réinstallé dans la chambre. Je me suis plongée dans mes rêves poétiques et me suis presque endormie…
Quand soudain le ronflement a recommencé… mais de l’autre côté!
Cette fois c’était notre chien Titi. Titi dort toujours près de mon lit dans sa corbeille. Il a un panier dans chaque pièce mais son lit principal est dans notre chambre bien sûr.
Alors, Titi ronflait et je l’écoutais: drrr… drrrr… drr …drrr…drrrr…drrr C’était tellement agréable, on aurait dit de la musique. Comme si Titi voulait me chanter: “Dors dors dors! Dors bien!”
Je ne voyais pas le chien dans le noir mais j’imaginais bien son joli petit corps, ses pattes, sa tête, sa queue, sa truffe noir…
“Titi, tu es si beau…”, j’ai dit tout bas. J’étais sûre que même dans son sommeil il fit des petits battements de sa queue ce qui signifiait: “ Oui, je sais, je suis le plus beau!”
Mais peu à peu son ronflement a changé.
Titi a commencé quasiment à grogner. Surement, il faisait un cauchemar. Quelqu’un l’attaquait dans son rêve et Titi a aboyé.
Alors j’ai tendu la main et ai caressé doucement le dos de mon Titi en lui disant avec une voix douce: “Titi, non, c’est seulement un rêve. Change de côté, mon chéri! Oui, comme ça… “
Titi a changé de position et m’a léché la main. Il s’est mis sur le dos,comme pour faire le beau, a étendu ces pattes arrières comme un petit bonhomme et a mis les pâtes devants comme un lapin. Il a une si heureuse capacité de s’endormir tout de suite.
Peu à peu je me noyais dans le pays des rêves sous un accompagnement de ronflement et je ne me rendais pas compte qu’il venait des deux côté.
Eté 2007 Ferney-Voltaire